La Constitution
(écrit généralement avec une majuscule) est un texte qui fixe l'organisation et
le fonctionnement d'un organisme, généralement d'un État.
La valeur de
la Constitution d'un État varie selon
le régime en place, elle a généralement une valeur supérieure à la loi. Elle est à
la fois l'acte politique et la loi fondamentale qui unit et régit de manière
organisée et hiérarchisée l’ensemble des rapports entre gouvernants et
gouvernés au sein de cet État, en tant qu'unité d'espace géographique et
humain. La Constitution protège les droits et les libertés des citoyens contre
les abus de pouvoir potentiels des titulaires des pouvoirs (exécutif,
législatif, et judiciaire).
Si la
fiction juridique veut que la Constitution fonde et encadre juridiquement
l'État, il est entendu que l'histoire politique la précède et peut lui conférer
à la fois sa légitimité circonstanciée et la permanence de son autorité. Cette
histoire politique est alors réintroduite dans le droit en étant qualifiée de
« pouvoir constituant primaire » (le pouvoir souverain qui établit une
nouvelle Constitution).
Plusieurs
pays honorent et maintiennent une conscience nationale par un jour de
célébration officielle (Fête nationale, Fête fédérale, Jour de la Constitution
ou « Constitution Day » en anglais).
Le terme « Constitution » est
également utilisé pour désigner les règles fondamentales d'organisations autres
que des États souverains : on peut ainsi parler de la Constitution de l'OIT, du projet de Constitution européenne ou de la Constitution civile du clergé. Il serait toutefois plus correct, pour ces
organisations, d'employer les termes de traité ou d'« acte fondateur ».
Étymologie
Nom formé à
partir de deux éléments latins :
- « cum » préfixe qui signifie « ensemble » ;
- « statuere » le fait « d'établir ».
Littéralement
le fait de fixer ou d'établir ensemble.
Définition
Une
Constitution est un ensemble de règles qui s’impose tant aux élus du Parlement
et du Sénat qu’à tout citoyen, et qui maintient la cohésion de la Nation lors
de chaque changement de bord politique du gouvernement.
Définition formelle
- La Constitution est un acte juridique, le plus souvent concrétisé par un ou plusieurs documents écrits nouveaux. Cet acte se situe au sommet de son ordre juridique : tout autre acte juridique doit être conforme à ses prescriptions. Ainsi, selon la théorie de la hiérarchie des normes, développée notamment par Hans Kelsen, chaque règle de droit est légitimée par une règle de droit supérieure et à laquelle elle doit être conforme (le règlement est inférieur à la loi, elle-même inférieure aux traités, inférieurs à la Constitution - à l'exception peut-être des traités communautaires en France, voir infra : Nature du Traité établissant une Constitution pour l'Europe). La Constitution se trouve ainsi être la loi fondamentale qui légitime toutes les normes inférieures.
Cette
théorie est complétée par le principe de constitutionnalité, qui
indique que la Constitution est le principe suprême du droit d'un État et que
son respect, obligatoire et nécessaire, est assuré par une cour
constitutionnelle, que ce soit un Conseil constitutionnel (comme en France) ou
une Cour suprême (comme aux États-Unis).
- Cette place au sommet de la hiérarchie des normes résulte du fait que la Constitution est créée par le pouvoir constituant originaire, et révisée par le pouvoir constituant dérivé ou institué. C'est donc un acte juridique imposé par le pouvoir constituant à tous les organes de l'État et à la société. Elle relève donc d'une logique verticale du pouvoir, comme les lois ou les règlements. Cette logique s'oppose à celle, horizontale, des contrats et des traités (nom donné à des contrats particuliers entre personnes morales de droit international), où les cocontractants sont, tout au moins juridiquement, égaux, et doivent consentir aux droits et obligations résultant des actes qu'ils signent.
Des
confusions ont pu apparaître entre ces deux logiques, du fait de la doctrine du
contrat social. Cette théorie consiste à dire que la Constitution de l'État
résulte d'un contrat passé entre tous les citoyens, égaux en droit. Cependant, cette doctrine n'a pas de réalité juridique.
Applications pratiques de la distinction
Ces deux
définitions se recoupent la plupart du temps (un nouveau texte constitutionnel
aura toutes les caractéristiques d'une nouvelle constitution au sens matériel
du terme) ; cependant, elles peuvent diverger.
Ainsi, si un
changement politique radical fait que la constitution est appliquée d'une
manière complètement différente, et ce sans qu'il y ait pour autant de
changement du texte constitutionnel, alors il n'y aura pas nouvelle
constitution au sens formel du terme, alors que d'un point de vue matériel, si.
Au contraire, une constitution qui sera adoptée formellement ne sera pas une
nouvelle constitution au sens matériel du terme si elle n'est pas appliquée.
Les sources de la Constitution
- La primauté de la nation : Sieyès - à la différence de Rousseau- « tient pour le rationnel et pour le construit. L'état social, par rapport à l'état de nature, perfectionne et ennoblit l'homme. Il étend et protège la liberté. Il défend et assure l'égalité des droits ».
Pour lui les véritables rapports
d'une constitution politique sont « avec la nation qui reste
» plutôt qu'avec « telle génération qui passe ; avec les
besoins de la nature humaine, commune à tous, plutôt qu'avec les différences
individuelles ». Dans « Qu'est-ce que le
Tiers-État ? », Sieyès proclame : « Considéré isolément,
le pouvoir des citoyens serait nul, il ne réside que dans l'ensemble .»
La nation ne se crée pas elle-même,
elle existe; elle est de droit naturel, mais elle a besoin d'une organisation
politique et administrative, ou selon les termes de Sieyès d'un établissement
public, c'est-à-dire un ensemble de moyens formés de personnes et de choses,
destiné à réaliser les fins sociales :
« La constitution politique
est postérieure à la formation en Nation. Elle intervient alors qu'il existe
déjà une volonté commune, antérieure à elle »
- Le pouvoir constituant : Sieyès reconnait que l'ensemble des citoyens a le droit de régler son gouvernement. Or ce gouvernement ou le maniement des intérêts généraux de la communauté est une œuvre toute humaine et se trouve être de première importance puisque la volonté de chacun et de tous met en cause le bien-être et la liberté de chacun et de tous.
Par suite, sans mandat exprès, les
législateurs ne doivent pas toucher à ce grand ressort de l'État qu'on nomme la
constitution
« On interdit, et avec
raison, ce pouvoir aux assemblées ordinaires, pour éviter des usurpations
possibles, et des agitations certaines. Et quand il est nécessaire de toucher à
la Loi suprême, le peuple, suffisamment averti, donne un mandat spécial à une
Assemblée constituante, à une Convention, chargée expressément, et à
l'exclusion de tout autre corps, de réviser la Constitution... »
Les caractères d'une Constitution
Coutumière ou écrite
Une
Constitution écrite est formalisée dans un texte unique ou un ensemble de lois
constitutionnelles. Elles représentent la grande majorité des constitutions
modernes.
La
Constitution coutumière est l'ensemble des règles relatives à l'organisation du
pouvoir qui ne se trouvent pas sous forme écrite. Ces règles sont appelées
« Conventions de Constitution ». Cela n'empêche pas qu'un ou
plusieurs documents écrits servent de base pour cette Constitution.
Jusqu'à la
fin du XVIIIe siècle,
l'organisation politique des États était régie presque entièrement par la
coutume, notamment dans les États monarchiques avec des règles de dévolution du
monarque. La forme coutumière a progressivement disparu en même temps que la
monarchie absolue. En effet, les XVIIIe et XIXe siècles
correspondent à des époques de rénovation politique et, par conséquent,
constitutionnelle.
De plus,
elle présente trois inconvénients majeurs par rapport à une Constitution
écrite :
- elle n'est pas réfléchie (elle ne procède pas d'un choix ni d'une construction rationnelle) ;
- elle est imprécise et peu détaillée (elle ne peut prévoir aucun cas qui ne soit déjà arrivé) et pose des problèmes de clarté et de sécurité juridique ;
- elle n'est pas démocratique dans son élaboration (le peuple n'y est pas associé).
D'un autre
côté, contrairement à une Constitution écrite,
- une Constitution orale est souvent moins sujette aux aléas de la politique.
Actuellement,
seul le Royaume-Uni est resté
fidèle à une Constitution coutumière parmi les États occidentaux, même si cette
position doit être nuancée. D'autres pays dans le monde, notamment certains
pays musulmans comme l'Arabie saoudite (en réalité
l'Arabie saoudite a une Constitution religieuse et non pas coutumière), ou
encore Israël, la Nouvelle-Zélande, Oman ou le Québec (province
canadienne), en sont dotés également.
- Constitution du Royaume-Uni
- Constitution de la Nouvelle-Zélande
- Constitution québécoise
- Lois fondamentales d'Israël
Rigide
ou souple
Une
Constitution est dite souple quand la procédure de révision est la même que la
procédure d'adoption des lois (cas très rares quand il s'agit d'une
Constitution formelle). Cependant, les pays appartenant au système de common
law, comme le Royaume-Uni et dont la Constitution n'est que matérielle ont
techniquement une procédure de révision souple puisque les lois qui influent
sur les prérogatives de la Constitution (fonctionnement des pouvoirs) sont
modifiées de la même manière que les autres.
Une Constitution
est dite rigide quand sa révision requiert une procédure différente de
l'adoption des lois ordinaires ; ainsi en France la Constitution est
rigide car elle exige soit la convocation du Parlement en Congrès à Versailles
avec une majorité des trois cinquièmes en faveur de la révision soit un
référendum populaire (Article 89 de la Constitution de 1958) alors que les lois
ordinaires sont votées à la majorité simple et font la navette entre Assemblée
Nationale et Sénat.
Une
Constitution est aussi dite souple quand la procédure est plus facile que pour
l'adoption des lois normales (cas extrêmement rares).
Pour finir,
rappelons que ce qui compte dans la définition d'une Constitution entre rigide
et souple est seulement et uniquement la procédure de révision et non pas le
fait qu'elle facilite ou non l'adoption d'une révision de la Constitution.
Contrôle de la Constitutionnalité
Une cour
constitutionnelle est l'organe chargé d'assurer la primauté effective de la
constitution qui est, selon la théorie de hiérarchie des normes, la norme suprême. Il convient
donc, pour assurer l'État de droit de vérifier
la conformité des lois par un contrôle.
À partir de
l'exemple de la Constitution américaine (Cour suprême des États-Unis en 1789),
le modèle de la Cour constitutionnelle se répand au XXe siècle dans le
monde entier, avec une organisation et des contre-pouvoirs d'une grande
diversité. Ainsi le contrôle des lois peut se faire a priori ou a
posteriori. La saisine peut être réservée à certaines autorités, ou ouverte
aux particuliers. Enfin, certaines cours ont d'autres attributions
juridictionnelles (dans le domaine électoral par exemple) ou administratives.
Ce modèle
diffère de celui employé dans les pays de tradition juridique anglo-saxonne, où le
contrôle de constitutionnalité se fait devant le juge de droit
commun, à l'occasion d'une instance ordinaire.